En me faisant tatouer la marque des ténèbres sur l'avant bras et en prêtant allégeance à Lord Voldemort en devenant son mangemort, je n'aurais jamais pensé à avoir à m'accoutumer à une vie si banale et dépourvue de rebondissements. Mes parents m'avaient toujours conté leurs missions comme des moments glorieux me faisant rêver sans aucun doute. Je m'imaginais déjà revenir, l'allure triomphante, pour annoncer au Seigneur des Ténèbres le nombre impressionnant de marques des ténèbres que j'aurais laissé flotter au-dessus des toits des maisons des nés-moldus que j'aurais tué – le fait de devenir un meurtrier pour le compte d'un mage noir, ne me faisant dès lors, ni chaud ni froid. Pourtant, j'avais été refroidi dans mes idées dès ma première mission ; servir de nourrice à une dizaine d'enfants de mangemorts, n'étant pas la chose pouvant me permettre les exploits héroïques que j'espérais alors accomplir. Bien loin de me démonter pour si peu, j'avais alors décidé de mettre le plus d'énergie que je le pouvais dans cette mission, pour le moins plus éprouvante que je ne l'aurais cru aux premiers abords, espérant que si je me montrais digne de cette tâche que l'on m'avait attribué, je pourrais alors recevoir des missions plus importantes à accomplir. J'étais vraiment assez idiot pour croire que les mangemorts avaient une hiérarchie comme pouvait l'avoir le ministère de la magie. Aussi, après que les mangemorts soient venus à la conclusion que j'accomplissais bien mon travail, me comportant comme un véritable papa poule, je me vis remettre le droit de continuer ma tâche encore plus longtemps. Ce fut seulement au terme de ma deuxième année passée en tant que nourrice, que je compris finalement comment fonctionnaient les mangemorts. Aussi je me retrouvais à devoir lancer un impero à un mangemort venant déposer son gamin, pour enfin pouvoir m'extirper de ce calvaire, l'obligeant à prendre ma place. Je rejoignais ainsi mon maître, enfin. Mais ce n'était que le début des tâches ingrates que l'on m'obligeait à mener à bien. Nourrir les serpents du Seigneur des Ténèbres ou encore nettoyer le sol du repère des mangemorts, n'étaient pas forcément des travaux plus dignes que celle consistant à changer la couche d’enfants particulièrement répugnants. Au moins, j'approchais enfin de cette table en chêne autour de laquelle se réunissaient le Lord et ses plus proches fidèles, pouvant même entendre sa voix lorsque je collais mon oreille au battant de la porte. Je n'avais enfin plus besoin d'apprendre ce qu'il se passait autour de cette table, par le biais d'un mangemort ayant trop bu et parlant un peu trop. Je commençais à me sentir un temps soit peu important – impression qui disparaissait bien vite lorsque je baissais les yeux en direction du balai que je tenais dans la main, me devenant presque plus utile que ma propre baguette. Je fus finalement autorisé à prendre une place autour de la grande table où se réunissaient les mangemorts, au bout de ma cinquième année en tant que mage noir à la botte du Seigneur des Ténèbres. Les choses ne s'étaient pas tout à fait passées comme prévu, puisqu'il m'avait simplement surpris en train d'écouter une énième fois à la porte, et m'avait invité en me servant une remarque acerbe. Au début tout à fait terrorisé par l'idée de devoir m'asseoir à la même table que mon maître, je m'étais rapidement fait à l'idée, m'emplissant d'une certaine fierté à l'idée d'enfin devenir un véritable mangemort, n'accordant aucune pensée à tous ceux ayant à passer par le même chemin que moi. Mes parents avaient d'ailleurs été très fiers de moi lorsque je leur avais appris la nouvelle, mais je ne les vis jamais venir s'attabler dans la même pièce que moi. Enfin bref, après ça, ma première véritable mission – enfin une ne nécessitant pas d'être enfermé entre quatre murs – ne tarda pas à arrivée. Mais aujourd'hui, je me demande simplement si celle-ci ne m'a pas été confiée dans l'unique but de se débarrasser de moi, étant donné que je ne vois pas ce qu'elle pourra apporter à l'ensemble de notre groupe de mages noirs, ni pourquoi celle-ci me prend autant de temps à accomplir – bien que l'on m'assure sans cesse que cela est parfaitement normal.

En effet, cela doit bien faire quelques mois que je suis à présent obligé de faire le tour de quelques boutiques de Londres, ayant à commander des choses aussi débiles qu'inutiles, pour le compte du Seigneur des Ténèbres. Je ne sais même pas à quoi cela puisse le servir, mais je contente de me plier à ses envies, n’ayant pas réellement l’intention de m’attiser ses foudres. Ainsi, tandis que je me plie à ses désirs, j’analyse calmement ce qu’il me demande de faire et tire les seules conclusions qui me sont permises de voir. Pas encore assez idiot pour suivre tout à fait aveuglement le mage noir, j’essaye de comprendre ce qui se cache derrière ce qu’il me demande de faire. J’ai ainsi pu remarquer la façon dont certains commerçants refusaient de coopérer en voyant le nom de mon maître inscrit sur les diverses commandes, au mépris des sommes d’argent importantes qu’il pouvait leur proposer quelques fois ; tandis que d’autres, allécher par les sommes promises, ne mettaient pas longtemps à accepter les propositions du Seigneur des Ténèbres. Alors que ceux refusant de coopérer finissaient généralement par disparaître et que ceux qui lui portaient trop d’intérêt, finissaient généralement par ne plus apparaître dans la liste des personnes avec lesquelles entrer en contact. D’autres ne semblaient montrer aucun intérêt particulier au nom inscrit sur la commande, ni aux sommes monstrueuses qu’on leur proposait, considérant généralement mon maître comme un client normal. C’était ceux-là qui restaient généralement le plus longtemps sur la liste des personnes que j’avais à contacter. Et aujourd’hui n’étant pas un jour faisant exception, je me retrouve avec, entre les mains, un bout de parchemin sur lequel est inscrit le nom d’un homme vers lequel je dois souvent aller. Avant, cela ne me dérangeait pas particulièrement, mais à présent que j’ai découvert que sa nièce – tout le temps avec lui dans la boutique – est une cracmole, l’idée de venir passer du temps en leur compagnie ne m’enchante plus vraiment. Je ne souhaite pas faire déshonneur au Seigneur des Ténèbres en refusant de mener à bien une mission pour si peu, surtout que j’ai conclus très récemment que les personnes que je devais aller voir n’étaient uniquement que des personnes étant encore assez neutre face à lui. C’est certainement pourquoi je suis toujours amené à venir ici. Je soupir un bon coup avant de pousser la porte de la boutique des Figg. Je salue tout d’abord l’homme derrière le comptoir, d’un bref signe de tête, avant de lancer un regard d’ensemble sur la pièce. « Votre nièce n’est pas là ? » je constate alors. En effet, c’est plus une question rhétorique qu’autre chose, puisque je remarque bien son absence. Il est bizarre de ne pas la voir ici, mais cela est tout à fait compréhensible en même temps. Après tout, je n’ai pas été très sympathique à son égard en découvrant sa nature de cracmole. Sachant qu’elle avait déjà tendance à se cacher dans l’arrière-boutique lorsque j’étais là, il n’est pas étonnant qu’elle continue à le faire à présent que je me montre réellement ingrat à son égard. C’est la seule conclusion que je parviens à trouver, tandis que je m’approche finalement du comptoir, tendant mon bon de commande à l’homme face au moi.